Lors de mes derniers articles, je vous ai fait partager mes retours d’expériences sur le Lean. Très clairement, la méthodologie Lean peut améliorer notablement vos performances industrielles sur les 3 axes fondamentaux que sont : la qualité, le délai et le coût (je cite ce dernier volontairement car il ne doit jamais être le moteur de la démarche mais bien une conséquence)
Ceci peut être accompli tout en améliorant les conditions de travail, les déploiements Lean qui aujourd’hui suscitent des polémiques quand à la dégradation des conditions de travail observée ont clairement oublié l’essentiel : faire participer les opérateurs et les mettre au cœur de la démarche.
Maintenant, attention le Lean ne peut pas suffire à gérer efficacement une usine. Le Lean est dans l’exécution, l’anticipation court terme par contre l’organisation du moyen et du long terme passe par une fonction planification robuste et bien organisée.
Je pourrai vous parler PIC (Plan Industriel et Commercial), SOP (Sales & Operational Planning), PDP (Plan Directeur de Production) mais le sujet de cet article n’est pas là.
Dans de nombreuses entreprises, on peut se rendre compte que les engagements financiers matérialisés par des commandes passées aux fournisseurs ne sont pas réellement contrôlés. Aussi on peut à l’issue d’un MRP basé sur des données fausses (elles sont pour la plupart saisies manuellement directement ou indirectement), engager des centaines de K€ ou des millions sans qu’un réel process de validation amont ne soit en place.
Je vous invite à regarder les pratiques dans vos entités respectives mais bien souvent ce contrôle n’existe pas. Le Lean nous dicte de chasser les mudas et sur le process post MRP décrit, nous sommes parfois en boucle ouverte.
Remarquez que cela ne nous empêche pas ensuite au quotidien de chasser la centaine d’euros dans nos actions, c’est tout de même un paradoxe…
De mon point de vue, la littérature sur cette problématique est très réduite voir inexistante.
Comment faire pour contrôler que vos engagements financiers soient corrects et qu’une modification de nomenclature erronée ne vous demande pas soudainement des achats nouveaux qui se noieront dans la masse des traitements quotidiens et qui une fois stockés constitueront de la dépréciation comptable puis de la casse qui grèvera directement et de façon significative le résultat annuel de l’entreprise ?
Il n’y a pas une méthodologie mais trouver ci-dessous mon expérience qui permet de dormir tranquille et d’être serein vis-à-vis de votre DAF.
Tout d’abord il s’agit d’avoir une extraction informatique qui va lister sur tous vos codes articles à une maille de temps choisie la quantité qui est soit en commande chez vos fournisseurs ou soit proposée pour achat par votre MRP.
Valoriser alors cet engagement pour chaque code article et pour chaque maille de temps (semaines / mois)
Puis d’un jour sur l’autre, comparer les variations de ces engagements sur ces mailles (en cumulé)
Si des variations existent alors vous pouvez extraire les codes articles à l’origine des écarts en comparant le fichier du jour et de la veille. A partir de cette base, les personnes en charge de la planification peuvent ensuite analyser le pourquoi de l’écart et sa normalité. Une astuce utile : si votre informatique est capable de sauvegarder ce qu’on appelle communément la revue des besoins d’un article en archivant celle de la veille alors l’analyse de la variation est très facile.
Un outil de contrôle ne suffisant pas, je vous en propose deux autres complémentaires :
• Valorisez les montants des messages de votre ERP : montant des ordres à annuler, montant des ordres à repousser, montant des ordres à avancer, …Des variations très importantes d’un jour sur l’autre doivent vous interpeller et de la même façon vous devez regarder les montants les plus importants qui sont à l’origine des écarts : sur quels codes articles ils portent et commencer à investiguer.
• Regarder les commandes d’achats crées la veille (= en règle général toujours annulables) sur des codes dépréciés par votre contrôle de gestion du fait d’une rotation lente ou inexistante. Idem, investiguer soit il y a un problème de gestion évident (prévisions erronées, …) soit le code se remet à tourner et il faut se poser la question avec votre contrôle de gestion de reprendre la dépréciation ce qui sera bénéfique pour le résultat de l’entreprise.
Evidemment, un nouveau PDP rentré, de nouvelles prévisions calculées engendreront des variations mais très vite vous saurez distinguer le normal de l’anormal.
Ceci peut paraitre une démarche lourde mais si vous peaufinez vos outils vous pouvez arriver à ce qu’on peut appeler une « validation base » très rapide (moins de 30 mn tous les matins) et vous pouvez ensuite autoriser vos approvisionnements à exploiter le MRP et à engager financièrement les commandes fournisseurs.
L’expérience vécue est parfois édifiante : vous découvrez des bugs MRP qui se déclenche dans des conditions particulières, des mauvaises consommations de prévisions, des doubles besoins, des pièces sorties du stock de façon non justifiée, …c’est du vécu…
Evidemment sans tous ces contrôles, on considère que le système par essence marche bien et on passe ses journées à essayer d’économiser quelques centaines d’euros alors que la veille ce sont des dizaines de K€ qu’on a acheté et ce sans raison tangible. L’ignorance permet de dormir tranquille mais à terme gare aux cauchemars qui se nommeront surstocks inutiles, dépréciations, casse et je vous en passe et des meilleurs.
Merci Sébastien pour ces rappels de bon sens.
Je confirme que les vérifications de bon fonctionnement ne sont malheureusement pas monnaie courante concernant l’exploitation des ERP, c’est du coup un axe de progrés systématiquement partagé avec nos clients.