Episode 9 : deuxième réunion : analyse
Cela faisait 3 heures que les quatre « brigades » de trois, chargés de s’imprégner des processus sur le terrain et de collecter des informations bien précises sur ceux-ci, avaient été lâchés dans l’usine pour récolter les informations.
Nombres de machines utilisées, temps de cycle de production, nombre de shift, nombre de pièces de stock en cours,…
Chaque équipe, sous mes directives avait pu s’imprégner, et récolter les informations qui lui étaient demandées, je les accompagnais sur le terrain, volant d’un poste à l’autre afin de mesurer de la pertinence des infos qu’ils relèveraient et du bon déroulé de leur travail.
Lorsque c’était possible, je leur avais demandé d’uploader les données récoltées dans l’espace de travail ad hoc du drive du projet.
Notre Labo d’atteinte de la perfection restait en accès libre pendant tout ce temps de sorte qu’à tout moment il était possible pour les équipes de revenir en salle pour revoir le flux, affiner celui-ci et compléter les différents tableaux.
Des photos étaient prises également, les plus pertinentes seraient affichées dans le local, les autres devaient être uploadées sur l’espace de stockage virtuel du projet.
La phase 2 de la réunion avait était fixée après la pause déjeuner, le but serait d’analyser et de sortir les premières pistes d’amélioration.
La demi-heure précédent la réunion, j’avais commencé à télécharger les données récoltées et envoyées sur le drive et les analysait afin d’en dégager des indications sur la maitrise des processus que nous discuterions l’après midi..
A 14 h 30 la réunion recommençait.
Plutôt que de passer tout de suite à l’analyse des données, je choisis de laisser la parole à toute l’équipe et initiais un tour de table : chacun devait décrire comment son travail de terrain s’était déroulé en précisant les points positifs et négatifs de cette expérience.
Globalement les participants avaient été satisfaits : ceux qui étaient loin de la production, Nicole la comptable et Géraldine la responsable ressources humaines surtout, avaient fortement appréciés car ils « savaient enfin ce que l’on fabrique dans cette boîte »
Mathieu, aux achats connaissait bien l’atelier, mais « n’avait jamais vraiment pris le temps de discuter avec les ouvriers » et comprenait mieux maintenant les exigences des ouvriers lorsqu’ils se plaignaient de la qualité de outils de coupe ou des disques diamantés
Ensuite, j’organisai un deuxième tour de table où chacun présentait les résultats, que nous reportions sur les tableaux.
Je leur avais demandé aussi de représenter les temps de cycle de chaque machine sur un histogramme, avec, en ordonnée, l’échelle du temps. Sur cet axe, une droite était tracée horizontalement à la valeur du TAKT time (temps disponible par jour par rapport au nombre d’unités vendues quotidiennement) que nous avions calculé précédemment.
Chaque équipe, à tour de rôle dessinait donc un bâton sur le flipchart, proportionnellement au temps de cycle.
A la fin de ce tour de table, nous avions complété la cartographie du flux de valeur de ses données de production et nous avions pu commencer à calculer les indicateurs, identifier les premiers goulots d’étranglement et nous pouvions commencer à critiquer de façon objective et constructive – puisque toute les données était factuelles, mesurables et mesurées :
– Je ne comprends pas comment nous pouvons commencer à usiner le support du collier de serrage alors que le corps de l’outil n’est même pas prêt ;
– Il ont mis 12 minutes a changer les outils de la fraiseuse avant de pouvoir commencer à travailler, c’est beaucoup trop long
– Il faut 2 jours pour que le corps de la pièce revienne de chez le sous traitant, comment est ce possible de bloquer la production aussi longtemps ?
– A l’assemblage, une pièce sur 3 ne passe pas le contrôle qualité ! Comment est ce possible ?
Je notais les remarques et les questions sur le flipchart au fur et à mesure qu’elles arrivaient.
Après ¾ d’heure, nous avions récoltés pas moins de 12 opportunités d’amélioration…
C’est à ce moment que la créativité de l’équipe allait devoir se manifester.
Je leurs concédais une courte pause, pour aérer les esprits puis après le café, nous démarrions la partie amélioration continue
La question était la suivante : comment résoudre les problèmes identifiés ?
Nous utilisions un brainstorming, c’est-à-dire que les idées devaient êtres lâchées sans devoir les classer ni les juger, les idées même les plus folles étaient autorisées et tous les participants devaient participer, sans d’auto censure, il était même conseillé de rebondir sur les idées de leur camarades.
Après une heure, les idées s’essoufflaient, preuve que les cerveaux, avaient été pressés un maximum, comme un citron et que plus aucun zeste intéressant ne pouvaient encore être tirés.
Il n’y avait pas que l’intellect qui était épuisé : tandis que certains, plus polis que les autres faisaient des efforts pour ne pas bailler, d’autres avaient relâché leur maxillaires.
Il était 17h, je les libérais et leur donnais rendez vous le lendemain pour attaquer le plan d’action.
Je me sentais un peu comme un professeur à la fin de sa classe : je me rassis, posais mon coude droit sur mon genou gauche en me tenant le menton et jetais un regard panoramique sur les différents supports afin d’admirer le travail accompli tout au long de la journée.
Je souriais, nous avions fait du bon boulot…
A mon tour je baillais. Ce genre de journée était passionnant mais requerrait une énergie folle. En fin de journée j’étais en général à ramasser à la petite cuiller.
J’éteignis la lumière traversai le couloir, entrai dans mon bureau, pris mes affaires et fit un salut de la main à Roger Goupil en passant devant lui.
Il savait qu’il ne fallait pas me parler après un Kaizen, il me jetait donc simplement un regard interrogateur pour prendre la température…mes deux pouces levés et mon clin d’œil le rassura.
:,: – Article proposé par David JOB, Consultant en Excellence Opérationnelle – :,:
Je voulais te remercier pour ton blog et tes articles qui sont toujours un vrai bonheur à lire !
Votre article me fait penser un concept clé : Process Door et Data Door.
Pour avoir les meilleurs résultats en amélioration continue (Lean six sigma par exemple), l’idéale est d’utiliser ces deux approches.
La process door: c’est l’information du terrain, observation du gemba,la technique, le bon sens quoi !
La data door: c’est les chiffres, le factuel, les indicateurs !
L’un ne va pas sans l’autre.
Personnellement j’utilise la hiérarchie suivante dans mes analyses.
1- Process (observation du terrain)
2- Graphique (tracer les données)
3- Analyse (outil statistique, test d’hypothèse, comparaison de moyenne…)
Retenez cette démarche avec l’acronyme PGA !