:: – Article proposé par Joël-Henry GROSSARD du site theoriedescontraintes.fr – ::
Managers, lorsque vous ne savez plus ni quoi et ni comment faire, faites donc une réunion…ou plutôt faites-en moins et mieux grâce à mon indicateur de suivi!
Je soupçonne le manager-type de nos structures hiérarchiques fonctionnelles, perdu qu’il est dans l’abondance des données et enfoncé dans l’ignorance du quoi faire réellement pour s’en sortir, de susciter des réunions dans l’espoir – le plus souvent vain – qu’il en sortira quelque chose.
Nous savons tous que les réunions sont trop nombreuses, que trop peu respectent le temps imparti au départ en le dépassant allègrement, que les sujets proposés sont rarement traités comme on l’imaginait lors de la rédaction de l’agenda, que l’insatisfaction est en général le lot de tout participant, qu’il soit animateur, partie prenante ou spectateur…
La réunion, c’est la porte de sortie de la plupart des managers, débordés, parant au plus pressé – ce que les anglo-saxons appellent joliment le fire-fighting, ce combat incessant pour éteindre ici ou là les incendies, un à un, alors qu’il s’en allume d’autres, ailleurs.
Je vous propose, dans ce court article, de définir une mesure pertinente de ce phénomène : la réunionite. Non pas que je sois contre toute réunion, au contraire. Mais je postule la loi suivante : plus il y a de réunions, plus les problèmes non résolus sont nombreux. Et – corollaire – ne comptez pas sur moi pour croire que la plupart des réunions servent à résoudre les problèmes.
Je vous propose l’indicateur suivant : chaque réunion va compter pour le temps qu’elle a duré exprimé par exemple en minutes multiplié par le nombre de participants. Et on va suivre l’évolution de cette quantité sans dimension sur une période donnée, le jour, la semaine, le mois, l’année.
Prenons un exemple, pour être bien clair. Cette semaine vous avez participé à 8 réunions. Les durées en minutes et le nombre de participants sont indiqués sur le tableau de suivi hebdomadaire. L’indicateur homme/heure de réunion (HHR) est calculé dans la colonne de droite. L’HHR est l’unité sans dimension qui mesure la multiplication du nombre de participants par la durée de la réunion.
L’indicateur de suivi principal est surligné en jaune : 72 homme/heure de réunion (72 HHR).
Comparons-le à l’objectif que nous nous sommes fixé pour la semaine suivante, en admettant pour les besoins de la démonstration que nous ayons le même nombre de réunions sur les mêmes sujets avec les mêmes participants, mais en ayant décidé que les réunions dureraient 20 % de temps en moins (approximativement et en moyenne) que la semaine précédente :
L’indicateur HHR passerait de 76 à 58.
Outre la diminution de durée, d’autres variations « positives » de l’indicateur peuvent être obtenues en diminuant le nombre de participants, ou le nombre de réunions.
On pourra noter que le temps passé par semaine par un participant qui a assisté à toutes les réunions est passé de 11,25 heures à 9,25 heures (il a « gagné » 2 heures). Sur la base de 35 heures (très théorique, je le sais), il n’a consacré que 26,4 % de son temps en réunions la semaine du 19 au 23 décembre contre 32,1 % la semaine précédente.
Ces indicateurs sans dimension sont très intéressants dans d’autres cas. C’est ainsi qu’Eli Goldratt, l’inventeur de la Théorie des Contraintes, nous a proposé deux indicateurs de ce type :
- 1) Le TDD (Throughput Dollars Days) qui permet de mesurer la variation du poids relatif des retards de livraisons – on multiplie la valeur en dollars (exprimée en Throughput) de la livraison en retard et on la multiplie par le nombre de jours de retard par rapport à la date prévue. L’utilisation principale est de choisir entre les commandes en retard pour les traiter les unes après les autres. Il est ainsi évident que 10 commandes de 1 000 dollars (de Throughput) en retard de 5 jours vont peser 50 000 TDD alors qu’une commande de 10 000 dollars en retard de 10 jours va peser à elle seule 100 000 TDD. Il vaut mieux commencer par traiter cette dernière pour diminuer l’indicateur représenté par la somme des TDD.
- 2) L’IDD (Inventory Dollars Days) qui permet de mesurer, à l’inverse, ce qui a été produit en avance et qui n’aurait pas dû être produit.
Alors, êtes-vous prêt maintenant à soigner la réunionite…
Oui et Non, car optimiser ses réunions en les préparant et en les maitrisant avec un contrôle strict du temps et des participants permet d’aller à l’essentiel sans tergiversation ni perte d’un temps précieux pour tout le monde. Rien de pire que des réunions de service qui durent des heures avec une plus-value médiocre pour chacun.
De même souvent, une note bien préparée et correctement présentée évite des durées excessives pour les réunions et des discussions sans fin.
Maintenant sur l’utilité d’indicateur pour mesurer tout ça…
Nicolas Boisselet
Connaissant Joël, je ne pense pas que ce billet soit à prendre au premier degré… 🙂
J’imagine que son message porte davantage sur la mise en avant des réunions à faible valeur ajoutée et à l’intérêt du recours aux indicateurs de débit. La présentation de cet indicateur ne serait alors qu’un prétexte… mais je compte sur lui pour venir nous ne confirmer… 😉
Sur la base de ma propre expérience, 99% des réunions auxquelles j’ai assisté n’apportaient pas la valeur qu’elles coûtaient ! Donc MUDA.
Après, c’est un sujet dont on pourrait parler pendant des heures…
J’en profite pour recommander la lecture du livre « Processus et Entreprise 2.0 » qui présente une approche très intéressante de la réunion… J’en ferai une publication à l’occasion.
Au plaisir de vous lire.
Florent.
Je pense que chacun se fait sa propre expérience et analyse les choses différemment, d’où parfois (et heureusement) des avis divergents.
Je pense aussi que chaque personne peut faire un article, avec débat et critiques, sans s’attirer instantanément la foudre d’autres personnes.
« La parfaite raison fuit toute extrémité, et veut que l’on soit sage avec sobriété », Molière
Bonjour à tous,
Même si les commentaires supprimés n’étaient pas particulièrement sympathiques, je suis pourtant d’accord sur un point : ce n’est pas forcément une perte de temps que d’inviter des personnes non concernées par le problème étudié lors d’une réunion.
Par exemple, dans mon service, j’ai pris l’habitude d’inviter à chaque fois des représentants d’autres services (sauf lors de réunions de « cadrage » bien entendu). Cette pratique fait émerger trois points qui me semblent positifs :
1) Prise de conscience des contraintes et atouts des différentes équipes.
2) Rencontres régulières des différents personnels (avec les présentations des nouveaux mutés par exemple).
3) Partage des connaissances et reformulation de la mission plus générale de l’organisation via les missions particulières.
Je me permets donc de relativiser votre approche quantitative pour simplement humaniser « qualitativement » votre topic !
Merci et bonne journée.
Philippe Lépinard
Bonjour Philippe,
Pour info, les commentaires ont été supprimés suite à la demande de l’auteur Pascal. Je n’ai pas l’intention de faire de la censure ici… 😉
Pour revenir sur le fond, je pense que si les réunions servent à faire du lien, alors elles sont détournées de leur objet initial. Par ailleurs, on pourrait se demander pourquoi il est nécessaire de provoquer la rencontre et l’échange des personnes… Organisation en silo ? Recherche des optima locaux ? A méditer… 😉
Ce n’est pas un détournement, simplement un élargissement du spectre de l’objectif de la réunion.
Concernant l’organisation en silo, c’est certainement le cas, mais pas aussi formellement que ce syntagme le martèle. Les technologies de l’information ou structures hiérarchiques les plus performantes ne pourront jamais les supprimer totalement. Que faites vous par exemple des « découpages » géographiques, des communautés de pratiques, des groupes de collègues plus copains que collaborateurs, etc. ?
En effet, même dans une structure où la connaissance circule bien, il est nécessaire que chaque personne développe une démarche proactive pour ce partage. Dès lors que vous avez des hommes et des femmes, il faudra activer des canaux d’information simples et non technologiques (car ce que je pointe n’est pas quantifiable) pour proposer des échanges de qualité. Vous comprenez que je ne me situe pas du tout dans le contexte d’urbanisation des SI !
Des réunions bien préparées avec une population élargie sont pour moi des solutions efficaces. Cela fonctionne plutôt bien et permet une convivialité qui continue généralement lors des repas !
Bonne journée.
Philippe
Merci pour ces précisions Philippe mais je ne parlais pas des SI, bien au contraire.
D’ailleurs on fait souvent l’amalgame entre système de données et système d’information…
Personnellement je vote pour intégrer la salle de la machine à café dans le SI (Sys d’info)… C’est souvent un gage de communication entre les différents services ! 😉