Un de mes dadas du moment est de réfléchir à la structure systémique des business model… Dans cet article, je vous propose de découvrir quelles sont les contraintes d’un business model qui limitent le développement d’une entreprise… Sur cette base, nous pourrons alors réfléchir à à quoi que pourrait ressembler le business model idéal… 🙂
Pour rappel : Il n’y a que deux natures d’évolution qui régissent le fonctionnement du monde…
- Une boucle de renforcement qui s’illustre par un effet amplificateur (comme l’effet boule de neige…)
- Une boucle de régulation qui s’illustre par un équilibrage des forces autour d’un objectif (objectif au sens systémique du terme, c’est-à-dire un niveau qui régule le système)
A partir de ce petit point théorique, il est facile d’imaginer quel pourrait être le business modèle le plus performant ! Ce serait un business model qui fonctionne sur une boucle de renforcement et dont la limite de régulation serait tellement élevée qu’elle ne constitue, à aucun moment, une barrière à l’expansion de l’entreprise.
Les contraintes possibles…
Lorsqu’il y a régulation dans un système cela signifie qu’il y a une contrainte qui empêche (ou qui freine) la poursuite de la boucle de renforcement… Pour identifier les meilleurs business model, il convient donc d’identifier qu’elles sont les contraintes possibles !
La contrainte de ressources
Pour générer du chiffre d’affaires votre entreprise, va nécessiter des ressources. Ce peut être des matières premières, de l’argent, des employés… ces ressources peuvent constituer une contrainte ! Par exemple, si votre matière première est une denrée rare vous aurez des difficultés à vendre au-delà de ce qu’il vous est possible de vous approvisionner. Si vous êtes sur un marché où d’importants investissements sont nécessaires pour passer des barrières capitalistiques ou si le niveau de BFR (Besoin en Fonds de Roulement) est conséquent, l’argent risque de constituer une contrainte de taille. Enfin si vous êtes dans un secteur comme le bâtiment où les ressources humaines se font rares, cette contrainte risque de limiter votre croissance.
La contrainte de production
Que ce soit pour la vente de bien ou de service, l’activité de l’entreprise peut être régulée par la capacité de production de l’entreprise. Cette capacité de production peut-être conditionnée par une ressource goulot sur la ligne de production (Cf Le But de Goldratt), mais la contrainte peut également se situer sur la capacité de l’entreprise à industrialiser sa production. La contrainte de production peut également s’illustrer par la nécessité d’augmenter sans cesse sa capacité de production en embauchant ou en investissant dans du nouveau matériel.
La contrainte de temps
Très proche de la contrainte de production, il y a la contrainte du temps. C’est notamment le cas des consultants qui vendent leur prestation à la journée. En facturant 1000€ à la journée, le montant du chiffre d’affaires pourra difficilement dépasser les 20000€ par mois.
La contrainte dans la taille du marché
La contrainte qui régule la croissance de l’entreprise peut également se situer en aval de l’activité, c’est à dire dans le marché. Le niveau d’équipement des ménages constitue par exemple une contrainte importante pour l’expansion du marcher de l’électroménager. C’est la raison pour laquelle les entreprises de ce secteur misent tout leur business model sur l’obsolescence programmée (c’est-à-dire la conception de produits à durée de vie limitée, ex : l’ampoule qui est programmée pour ne pas durer plus de 2000h alors qu’il existe une ampoule qui fonctionne depuis plus d’un siècle).
La contrainte physique
L’aspect matériel des produits peut également induire une contrainte majeure d’expansion. C’est le cas que je citais pour la grande distribution qui doit gérer les aspects logistiques liés à la nature physique des produits qu’elle vend.
Je pense avoir fait un large tour des contraintes potentielles d’un business modèle, mais si vous en voyez d’autres : je suis preneur ! 😉
Demain, je vous présenterai quelles sont les alternatives pour faire tomber ces barrières… Et surtout, je vous dévoilerai quel est le business model idéal qui s’affranchit de toutes ces contraintes !
Bonjour Pascal,
Merci pour votre commentaire. J’avoue que j’ai toujours eu du mal à comprendre très clairement ce qui se cachait derrière cette notion d’entropie.
Mais de mon point de vu, cela n’a pas trop d’incidence de ne pas comprendre cette notion car elle n’apporte pas beaucoup d’éclairage sur le fonctionnement d’une « organisation productrice-de-soi » comme peut l’être une entreprise. Car pour ce type d’organisation, l’entropie reste à un état stationnaire pendant la durée de vie du système (cf extrait du livre ici – paragraphe 5 : http://elissalt.net/BIOTHECA/Annexes/AN%20ENTROPIE%201.pdf)
Donc si nature d’évolution entropique (et néguentropique) il y a, c’est à un autre niveau que cela se passe. 🙂
Au plaisir.
Florent
Désolé Pascal, je ne vois pas ce que vous entendez par gravitation… 😉
bonjour florent
je viens de découvrir votre blog, et je lis certains de vos articles avec beaucoup d’intérêt. étant moi-même très intéressé par l’approche systémique et le lean manufacturing, j’ai été curieux de votre article. concernant l’entropie, moi aussi j’ai mis du temps à comprendre ce que cela recouvrait. le concept d’énergie est également assez obscur, même si il nous est plus familier. l’essence dans ma voiture, c’est de l’énergie, mais aussi l’électricité, le charbon, le gaz… et aussi un ressort que j’ai comprimé … et aussi un plat de pâtes que je vais manger, c’est de l’énergie. Einstein nous apprend même que la matière, c’est de l’énergie (E = MC2). alors déjà l’énergie c’est un concept assez flou, alors l’entropie, qui mesure la dissipation irréversible d’énergie, c’est encore plus fumeux. et en même temps, le premier principe (conservation de l’énergie) et le 2ème principe (irréversibilité du temps) de la thermodynamique (appelée aujourd’hui mécanique statistique) sont essentiels pour comprendre le fonctionnement des systèmes à l’équilibre. à cela se rajoute une 3ème loi qui vient d’être démontrée (en 2003, par Dewar), qui concerne les systèmes hors équilibre (ce qui est le cas des cyclones, mais aussi des êtres vivants, des humains, des sociétés, des entreprises …) . Ce principe (MEP, en anglais: maximum entropy production) nous apprend que les systèmes (qui sont les structures dissipatives) s’auto-organisent de manière à maximiser leur capacité à dissiper l’énergie, et ceci en exportant à l’extérieur leur entropie interne.
Appliqué à l’industrie, cela explique pourquoi les entreprises qui appliquent les principes du lean sont plus performantes que les autres. En effet, supprimer les muda, mura et muri correspond à maximiser la dissipation d’énergie. De la même façon, réduire le lead time permet d’ exporter de l’entropie interne. Ou encore, résoudre les problèmes sur le terrain avec les opérateurs permet d’augmenter l’information interne, et donc d’exporter de l’entropie.
Je vous invite à lire l’article suivant : http://www.francois-roddier.fr/?p=32 qui vulgarise ces concepts de façon très pertinente, beaucoup plus que l’article auquel vous faites référence, qui est particulièrement ardu …
Merci Denis pour cette belle ressource ! 😉
J’ai dû mal m’exprimer… Je comprends que l’entropie puisse avoir un intérêt sur le plan théorique, mais je préfère concentrer mon énergie et ma concentration sur l’aspect opérationnel.
J’ai passé des centaines d’heures à manger des livres de systémique pour en percevoir ne serait-ce que les contours. Je suis content d’avoir fait cet investissement pour savoir aujourd’hui où aller piocher ce qui m’intéresse. Je trouve mon bonheur dans les écrits d’Edgar MORIN qui va au-delà de la cybernétique pour développer la pensée complexe. Et je m’éclate également dans l’approche opérationnelle de la systémique que l’on retrouve dans les travaux du MIT (Peter Senge, Robert Frit, Dennis Meadows…). J’adhère encore à ceux qui se sont servis des propriétés systémiques sur la résolution de problèmes d’entreprise comme (Deming, Akoff, Chekland, Sedden…). Mais j’ai définitivement tourné le dos à la théorie qui n’a d’intérêt que sur le seul plan théorique… Du moins de mon point de vu. 😉
Connaître les propriétés d’un système fermé ne m’intéresse pas à partir du moment ou 100% des systèmes auxquels je serai confronté sont ouverts. C’est un peu la même chose pour l’entropie. Je n’y ai pas trouvé l’éclairage que m’apporte d’une manière générale l’approche systémique…
Par exemple quand vous dites « Appliqué à l’industrie, cela explique pourquoi les entreprises qui appliquent les principes du lean sont plus performantes que les autres. En effet, supprimer les muda, mura et muri correspond à maximiser la dissipation d’énergie. » Nous pourrions tirer les mêmes conclusions suite à un plan social où on met la moitié du personnel pour « sauver l’entreprise ». De la même façon quand une entreprise fait rentrer des nouveaux investisseurs, elle se donne une bouffée d’oxygène et « maximise la dissipation » d’énergie en payant ses dettes, pour autant est-ce une bonne chose ? Bref, vous induisez un biais de jugement quand vous dites que le système « entreprise » est plus performant quand il dissipe ses muda… Mais un système n’a pas de jugement de valeur… La modélisation des systèmes ne fait pas de différence entre l’entropie « moralement » positive et l’entropie « moralement » négative…
Vous voyez ce que je veux dire ? 😉
Au plaisir de vous lire.
Florent.
Bonjour florent
Je constate que nous avons des lectures communes, même si je n’ai pas votre culture livresque. L’approche systémique donne également un éclairage très pertinent sur d’autres domaines que le management : je pense à la psychothérapie (par exemple, les travaux de M Elkaïm, passionnants), ou encore l’économie (je suis interpelé par le fait que, concernant la crise financière actuelle, tout le monde parle de crise systémique et que pratiquement personne ne l’ai analysée sous l’angle systémique. Une approche originale et pertinente est certainement celle de P Jorion, mais je n’en trouve pas beaucoup d’autres).
Je n’ai pas bien compris pourquoi vous opposez l’approche systémique et la thermodynamique, alors que pour moi, il s’agit de la même chose. je ne suis pas un expert, mais la systémique est une évolution de la 2ème cybernétique qui étudie les systèmes ouverts, loin de l’équilibre thermodynamique. Ce sont les principes de la thermo (et plus précisément cette troisième loi qui semble avoir été démontrée) qui font qu’un système présente des rétroactions soit positives soit négatives.
Concernant votre impression de jugement de valeur, pour le coup, c’est moi qui ai dû mal m’exprimer également. Il n’y avait pas de jugement de valeur dans mes propos, mais plutôt un constat. Quand Darwin annonce que la sélection naturelle privilégie les espèces les plus « aptes » (et donc qu’il y a des espèces qui sont plus efficaces que d’autres pour dissiper l’énergie), il ne porte pas de jugement. De la même façon, je ne porte pas de jugement, mais je constate qu’il y a des approches plus efficaces que d’autres. D’ailleurs, le capitalisme n’est ni moral, ni immoral, mais simplement amoral (le petit bouquin de A Comte-Sponville « le capitalisme est-il moral ?» est très éclairant).
Pour en venir au fond, je partage le fait que la théorie n’est pas forcément utile si elle ne nous apporte pas de nouveaux leviers d’action efficaces. Mais je ne comprends pas bien vos arguments. Quand je site les muda et autres, qui permettent d’exporter de l’entropie, je fais références aux processus. Faire un plan social ne dit en rien ce que vous faites sur les processus. Licencier des gens qui apportent de la VA est une catastrophe pour l’entreprise. Il n’y a que les financiers (qui n’y comprennent rien !) qui voient un plan social comme une décision utile. Quand malheureusement la survie de l’entreprise est en jeu, il est avant tout essentiel de travailler sur les processus pour éliminer les opérations qui augmentent l’entropie interne (ou qui n’apportent pas de valeur). Mais je pense que vous en êtes également convaincu.
De la même façon, faire appel à de nouveaux investisseurs (et donc augmenter sa dette !) pour éponger une autre dette ne fait que déplacer le pb, mais pas exporter de l’entropie.
Pour finir, je partage vos doutes sur les approches théoriques, surtout lorsqu’elles sont erronées. Et là, je pense aux calculs statistiques du 6 sigma (là non plus je ne suis pas expert, même si j’ai, dans une vie antérieure, appliqué Tagushi et mis en place des cartes de contrôle). Parler d’écart type sous-entend que l’on est face à une loi normale. Mais c’est ignorer que les lois normales sont très rares dans le monde réel. J’ai souvent été amusé de voir de superbes formules mathématiques pour calculer des stocks de sécurité, comme si le délai de livraison était une loi normale ou une loi de poisson.
Cordialement
Merci Denis de poursuivre l’échange… 😉
Pas évident de parler d’une matière aussi ardue que la systémique par écrans interposés. Sur le fond nous sommes d’accord (inutile donc de revenir dans le détail de nos échanges) mais il est difficile de nous aligner sur nos représentations par écrit. J’espère que nous aurons l’occasion de nous rencontrer pour échanger de vive voix sur ces sujets qui nous passionnent… 😉
Enfin, je n’oppose pas la systémique à la cybernétique… Là encore j’ai dû mal m’exprimer… Effectivement c’est strictement la même chose. En revanche il me semble qu’avec la pensée complexe d’Edgard MORIN on va un peu plus loin que les lois énoncées par l’approche systémique. 😉