Le succès du Lean vient d’un message simple : un process ne doit mettre en œuvre que les ressources nécessaires et suffisantes pour répondre aux vrais besoins de ses clients.
Evitons donc temps perdus et gaspillages pendant ce process. Comment aller plus loin dans la création de valeur(s) ? En vérifiant l’utilité du résultat du process, dans le process aval, pour l’utilisateur final, pour d’autres parties prenantes.
Prenons un exemple simple : le processus d’assemblage par 3 vis de 2 pièces d’une voiture.
Pour optimiser ce process, le lean mettra en place un 5S évitant les temps inutiles de recherche d’outils et de composants, standardisera le mode opératoire à partir des gestes les plus rapides, chasserons les mudas : stocks, transports, reprises, limitera les temps de changements d’outils …
Mais ce process, à quoi sert-il ? Le ‘client’ est le poste opératoire suivant.Il nous dira sans doute (VOC): « à réaliser X assemblages de 2 pièces A et B avec les 3 vis et boulons C, dans un délai D ». L’utilité du process est-elle vraiment celle-là ? Le besoin y estplutôt « disposer des X assemblages à monter sur un organe de voiture, sans perte de temps ». Est-il important pour l’opérateur aval que l’assemblage provienne de 2 pièces, et soit fait par 3 vis ? Sans doute pas. La solution « comment fait le process » ne fait pas partie de son besoin !En aidant ainsi ce client à exprimer son besoin sans à priori de solution, on peut imaginer bien d’autres façons de le satisfaire : fabriquer le composant en 1 pièce, assembler par soudure, … Constatons que l’expression du besoin lié à notre process d’assemblage n’est pas simple, et que la VOC, le SIPOC ou les autres outils du lean ne nous aident pas à y accéder…
Poursuivons donc avec notre bon sens : le choix d’assemblage par vis répond peut-être à une autre utilité ? Le process d’assemblage se poursuit jusqu’à la voiture, dont l’utilisateur sera le conducteur. Le fait que les 2 pièces doivent être solidarisées peut être utile au conducteur : par exemple pour résister à des efforts liés aux voyages. L’utilisateur accordera alors de la valeur à l’assemblage. Mais pourquoi pas réaliser l’assemblage en 1 pièce ou souder les composants ? Ceci permettrait d’optimiser notre processus de façon radicale, puisqu’on l’élimine …Les seuls à pouvoir bénéficier du choix d’un composant en 2 pièces sont, soit le fournisseur de l’assemblage s’il s’avèreplus économique à réaliser qu’un composant en 1 pièce, soitungaragiste qui devra en cas de panne démonter les 2 pièces pour en remplacer une … Mettre en évidence les vrais besoins de ces parties prenantes est indispensable pour optimiser notre process, même si elles en sont très éloignées !
Ces points ne sont pas anodins : si c’est le fournisseur de l’assemblage -pour qui nous devons optimiser le process-qui choisit de le fabriquer en 2 parties, il pourrait faire autrement : avec 1 vis et 2 tétons par exemple, ou par clipsage, ou par soudure.On peut optimiser le process en évitant les temps perdus, mais aussi en s’assurant que le résultat est utile et le coût complet minimal !
Le choix entre les différents moyens d’assemblage dépend de la résistance à l’effort entre les pièces et du coût bien sûr. Or vis + boulon + trou + assemblage coûtent plus cher qu’un point de soudure ! Pourquoi choisir d’assembler par vis ? Pas pour assembler (la soudure est moins chère) mais pour pouvoir désassembler : la soudure ne le permet pas ! Et pourtant, combien d’ingénieurs choisissent le moyen de fixation le moins cher en tenant compte de leur réversibilité ? Combien des milliers de vis et boulons sur une voiture ne seront jamais défaits ?!
On constate à travers ce petit exemple l’importance pour optimiser un process de vérifier le vrai besoin lié à sonoutput, par un dialogue avec les parties prenantes parfois très éloignées du process. Et l’on voit qu’il est pertinent d’optimiser à la fois le process et le produit qu’il sert à fabriquer !
Des méthodes Valeur(s) existent pour aider à transformer l’expression d’une demande en besoin. Et pour optimiser la performanceà chacun des niveaux : process, produit, service, business model … Et si on les mettait en synergie avec le lean?
D’autres exemples plus complets d’optimisation de process sont disponibles : gare de péage d’autoroute, process d’embouteillage d’eau … ou sur le site http://valeursetmanagement.com/
Il faut se souvenir de la phrase de Peter Drucker : « Il n’y a rien de plus inutile que de faire avec efficacité quelque chose qui ne doit pas du tout être fait ».
Bonjour,
Cet article très intéressant permet aussi de rappeler un BABA qui est que l’expression du besoin final est à intégrer au plus tôt dans les phases de conception car optimiser un produit après mise en production est lourd et coûte très cher, c’est un muda important !
A minima, il faut que l’aval remonte ces problèmes vers l’amont (la R&D) afin qu’on s’améliore en continue côté conception et qu’on élimine à terme ce muda, c’est le fameux REX (Retour d’EXpérience)
Merci Olaf
Sébastien