La semaine dernière vous avez eu l’occasion de voir la première partie de l’échange passionnant que j’ai eu avec Dominique DUPAGNE, l’auteur de « La revanche du rameur » qui met à mal les démarches qualité…
Aujourd’hui, j’ai le plaisir de publier la deuxième partie de cet échange !
Cliquez-ici pour accéder à la 1ère !
Si vous aussi, vous croisez sur le net des personnes dont la vision portée sur l’excellence opérationnelle vous interpelle… Contactez-moi sur f.fouque[@]excellence-operationnelle.tv pour m’en faire part ! 😉
Bonjour,
Merci pour cette interview. Elle est très riche d’enseignement et je suis convaincu que les idées présentées par D. Dupagne ont de l’avenir…
Toutefois, je souhaite rebondir sur 2 points de la fin de la vidéo : D. Dupagne souligne que pour trouver un bon spécialiste, il suffit de savoir quel spécialiste un spécialiste conseille à sa famille.
Comme le dit D. Dupagne, cela est totalement subjectif. Un peu avant dans l’exemple des lois du code de la route, il souligne la loi des grands nombres pour finalement « relativiser » ce côté subjectif ci-dessus.
Autant pour le code de la route et cette « réputation » donnée par les pairs, je conçois que la loi des grands nombres s’applique ; autant que le spécialiste médical, je suis sceptique.
Autrement dit, il faut connaître le choix d’un grand nombre de spécialistes sur leurs pairs pour faire le bon choix. Combien sont-ils exactement ? je doute qu’il y ait plus de 10-20-30 spécialistes en France sur une problématique précise.
Je transpose cette idée au monde du travail. On évalue le travail de quelqu’un par les autres personnes qui l’entourent, ou ses homologues s’il y a en. Cela peut être la population de cadres dans une entreprise, même si un cadre n’a pas forcément la même expertise qu’un autre pour juger son travail (ce ne sont pas des homologues au sens strict).
Cela veut dire que le travail est reconnu par l’image que l’on donne aux autres du travail que l’on fait. Et non sur le résultat. Je conçois cette vision des choses, et je pense qu’elle s’applique aujourd’hui dans le monde du travail.
Mais alors, ne valorise-t-on pas les personnes qui savent se mettre en valeur (peu importe la qualité du résultat effectué) ?
Et le deuxième point : D. Dupagne souhaite attribuer les ressources (€) aux personnes qui ont été reconnues comme faisant du « bon travail ». Quelle quantité de ressources attribuerait-il à qui ? Comment arbitrer entre les personnes ?
En bref, quand je réfléchis à la mise en pratique de cette idée, je retrouve beaucoup le système en place aujourd’hui, à la différence près qu’aujourd’hui c’est le N+1 qui valide « le bon travail » (mais s’il fait bien son travail, il s’appuie forcément sur ce que les autres pensent de son N-1 ; mais en effet cela ne « verrouille » pas les cas où le N+1 est un dominant avec volonté de nuire s’il se sent menacé par son N-1 par exemple).
Bref, c’est un peu confus, je vous prie de m’en excuser, mais j’aimerais ouvrir la discussion avec vous et vos lecteurs sur ce sujet passionnant qui est au coeur de la mise en place du Lean en France aujourd’hui!
Dominique Dupagne fait une analogie intéressante au système politique (dans le sens vie de la cité) sur l’évolution qui a eu lieu de la monarchie, vers la démocratie et devrais poursuivre vers l’hétérarchie aidé par le WEB 2.0. Il ne faut pas oublier que les entreprises sont encore restées au stade de la Monarchie. On pourrait envisager de faire évoluer les entreprises vers la démocratie dans un premier temps. Quoi qu’on en pense, l’histoire montre que les démocraties sont plus fortes et efficaces que les dictatures.
Cette interview me conforte dans l’idée que oui la performance opérationnelle a de l’avenir et est même sans doute l’avenir. Dominique Dupagne met en avant les spécificités de l’humain et explique qu’aucun système ne peut y échapper sans se fourvoyer. Je partage totalement cet avis. Par ailleurs, il insiste sur l’importance d’établir des relations de confiance, des bonnes relations humaines, de la nécessité de la contribution de tous, d’une hiérarchie de soutien, de la fonction indispensable du régulateur, de la dépendance forte du système sur le comportement…Tous ces éléments font partie des fondamentaux du lean six sigma et j’en suis fort aise! Cependant, la qualité est mise à mal dans l’interview et là j’adhère moins. En effet,le fonctionnement organisationnel des hôpitaux et le système politique sont notamment revisités et à juste titre; ainsi pourquoi ne pas remettre en cause également la ‘qualité’ telle qu’elle est souvent envisagée aujourd’hui, avec tous ses protocoles? La qualité tout à la fois procédurale et agile, c’est possible. Par ailleurs, poursuivre des objectifs et travailler avec des procédures industrialisées ne signifie pas qu’il ne faut pas les challenger ni ne pas les faire évoluer. Bref, je pense que les process industrialisés sont nécessaires mais on ne doit pas se priver de les remettre en cause pour les améliorer et ils doivent être élaborés collégialement. Bref,tout est dans l’état d’esprit et la mise en oeuvre.
Bonjour à tous et merci pour ces remarques stimulantes.
@Lap
Actuellement, ce sont ceux qui savent se mettre en valeur auprès de leur N+1 qui sont valorisés. Au contraire, les employés qui font leur travail discrètement et qui aident les autres ne le sont que très peu. C’est un énorme problème. Une appréciation subjective croisée permettra au contraire de montrer l’investissement et la performance d’employés discrets et ne sachant pas se mettre en valeur.
En revanche, ceux qui emploient toute leur énergie à gérer leur carrière sont bien connus de tous et seront mal notés, alors qu’ils « plaisent » à leur hiérarchie.
Dans la santé, il en est de même : nous savons, nous les médecins, qui est un imposteur alors qu’il est le chouchou des médias, et qui est le bon spécialiste qu’il faut aller voir pour un problème précis. Quand je dis « nous », ce sont les médecins qui sont proches de ce spécialiste par un échange de patients fréquent. Individuellement, je ne connais qu’une douzaine de médecins au top de leur spécialité. Mais collectivement, nous les connaissons tous.
Pour ce qui est de l’attribution de ressources, en entreprise comme ailleurs, il suffit de commencer progressivement sous forme de prime constituant 10% de la masse salariale, avant d’arriver au moins à 50% pour avoir un effet franc : plus besoin de mesurer la qualité par des outils, elle sera mesurée par tous, subjectivement mais bien moins imparfaitement qu’avec des critères dits objectifs comme le fait remarquer @denis.
@Dorothée
En effet, tout est dans la mise en oeuvre de la Qualité. Telle qu’elle est implémentée dans le monde de la santé et surtout dans les hôpitaux, c’est une désastre et terme de qualité réelle et de coût. Un exemple parmi d’autres http://www.atoute.org/n/article/la-campagne-de-vaccination-140.html
Mais il y a un écueil : on a longtemps dit que le problème du communisme, c’est qu’il avait été mal mis en oeuvre. En pratique, ses tares sont structurelles car il ne comporte pas d’outils pour juguler la domination par les nouvelles élites. J’ai bien peur qu’il en soit de même pour la Qualité, lorsqu’elle sort du champs de l’ingéniérie et de la production industrielle.
Merci M. Dupagne pour cet éclaircissement.
C’était un plaisir de vous écouter tout au long de cette vidéo.
Un ami m’a parlé d’une entreprise, Rip Curl, qui a basé tout son développement sur la théorie des petits groupes. Elle dit simplement qu’au delà de 150 individus, tous ne peuvent plus se connaître et que les loyautés réciproques ne jouent plus. Une hiérarchie de parasites se met alors en place, au détriment des rameurs. Mais, une simple séparation de quelques mètres entre deux bâtiments permet de couper un groupe de 300 personnes en deux groupes de 150. Rip curl a ainsi bâti sa croissance sur la multiplication de groupes de moins de 150 personnes.
PS : Lors de travaux, notre implantation principale abritant 600 personnes a éclaté les services sur plusieurs sites. Nous nous sommes retrouvés à moins de 150, tous autour d’un puits de lumière sur 3 étages au lieu d’être étalés sur 200 mètres de long.
Moralité : l’ambiance était meilleure, on organisait des barbecue le midi, des tas de choses qu’on imagine même pas là où nous sommes revenus. Maintenant, on fait de groupe de travail pour savoir pourquoi les gens sont malheureux…
@Cyrille, c’est tout à fait juste. Nous sommes sélectionnés par l’évolution pour fonctionner par petits groupes. Notre génome n’a pas suffisamment changé en 10000 ans pour échapper à ce déterminisme. D’où les problèmes qui apparaissent dans les sociétés trop grandes et surtout hiérarchisées.
Bonjour,
Cyril,
Pour faire échos à ton expérience des groupes de 150 personnes, je vous invite à écouter le podcast de manager tools concernant la règle des 150, ou le nombre de Dunbar, un anthropologue anglais.
Dunbar a défini qu’il nous était physiquement impossible d’entretenir de vrais relations avec plus de 150 personnes… Nous ne pouvons pas investir suffisamment de temps pour avoir un niveau de connaissance correct au delà de 150 personnes.
Ce podcast est en 2 parties.
En complément, en 15 min Dunbar explique ce concepte pour les relations amicales.
… Bonne écoute !
http://www.manager-tools.com/2010/05/small-company-systems-rule-of-150-part-1
http://fora.tv/2010/02/18/Robin_Dunbar_How_Many_Friends_Does_One_Person_Need