:: – Article proposé par Cédric Stien, Auteur de l’ouvrage Manager sans gaspillage, l’approche lean du management – ::
Tout le monde sait que le Lean n’est pas qu’une boite à outils. C’est avant tout une philosophie au service d’une organisation humaine. Pour réellement s’approprier la puissance du modèle Toyota, il faut donc en premier lieu prendre du recul sur nos façons de percevoir, d’analyser, de décider, et d’agir. En effet, de par notre culture nous avons une tendance naturelle à appréhender le Lean avec notre approche rationnelle, cartésienne, et cela ne nous aide pas. Bien évidement nous sommes capables de comprendre l’approche globale du constructeur japonais, cependant il y a un écart entre comprendre et être capable de faire émerger et faire durer une organisation compatible avec cette philosophie.
Dans un premier temps, Il faut acquérir un niveau de maturité tel que les compétences d’une gestion systémique et holistique, deviennent inconscientes. Pour faire une ballade en vélo en admirant le paysage sans tomber, vous devez savoir faire du vélo de manière inconsciente. Sinon, vous êtes en permanence concentré sur votre façon de faire du vélo, et vous ne profitez pas du paysage, et en plus vous pouvez quand même tomber. Si en effet vous n’êtes pas capable de voir, d’analyser, de décider et d’agir selon la « philosophie Toyota » de manière instantanée, alors la force du Lean sera certainement réduite à quelques mises en place d’outils ou de concepts sans en avoir tous les bénéfices escomptés (voire de nouveaux inconvénients) pour les clients ou les actionnaires qui, eux, regardent la performance globale.
Malheureusement, ce niveau de maturité ne suffit pas, il faut aussi revoir les règles, la mesure de la performance et les indicateurs de pilotage du système. En effet, nos organisations sont encore structurées sur une logique qui cherche à découper, analyser, optimiser localement et à ensuite à sommer les gains (pensez aux modèles financier !). Les logiques de flux et de processus, et les modèles financiers (Throughput accounting) sont certes déjà présentes depuis quelques années dans nos entreprises, cependant ces modes de pensées sont encore trop souvent limités à certains services transverses, et ne sont pas encore complètement assimilés comme els référence et sont souvent encore en conflit avec les règles de notre logique cartésienne.
L’encrage du modèle « fordien » dans nos organisations, est bien plus facile à changer que les croyances des personnes qui vivent dans le système. Nous sommes tous bien plus limités par nos modes de pensée et par ce que nous pensons savoir, que par les autres ou ce que nous ne savons pas. Par exemple : la désindustrialisation de la France est-elle due principalement à la compétition déloyale des pays « low cost » ou à notre incapacité à nous adapter à un nouveau contexte ? Il est donc primordial de mettre en place dans les entreprises les conditions de l’émergence de l’autonomie à tous les niveaux, afin d’avoir en permanence des solutions adaptées qui permettent l’efficience.
Impossible ? Non. Des entreprises ont déjà suivi ce chemin. Jean Michel Queguiner, le fondateur de Bretagne Atelier, a réussi à développer son entreprise, en France, pendant plusieurs décennies en créant un management performant et humain fondé sur Lean. Je vous conseille de regarder le documentaire de France Télévision sur le management de Bretagne Atelier « Direction des richesses humaines ». Favi est aussi un autre exemple. Allez sur leur site, l’approche managériale est en ligne : www.favi.com.
En plus d’une approche Lean du management, ces deux entreprises ont su aussi adapter le modèle Toyota à leur contexte et leur culture. Vous pensez toujours que ce n’est pas possible chez vous car les outils du Lean ne sont pas adaptés à votre situation. Vous êtes sur des marchés bas volume, avec un mix produit élevé qui ne vous permet pas de mettre votre production en ligne et d’appliquer le takt time, ou encore d’utiliser le kanban de manière efficiente, alors regardez la théorie des contraintes et l’ordonnancement avec un DBR et les points de commandes à partir de votre MRP pour déclencher des ordres de fabrication. La forte variabilité de quantité et de mix produit fait en sorte que la contrainte « bouge », alors regardez l’approche Quick Response manufacturing (QRM), avec sa méthode d’ordonnancement POLCA. Cela ne convient toujours pas, regardez autre part, adaptez ce qui vous semble le plus pertinent pour en faire quelque chose de compétitif dans votre environnement. Osez prendre ce qu’il y a de meilleur pour vous dans chaque approche. L’opposition entre les concepts (la TOC et le Lean, par exemple) est une limitation de notre programmation mentale cartésienne, et binaire. Ceux qui ont réussi ont vu leur complémentarité. Faites comme eux : autorisez vous le lâcher-prise « mental », n’attendez pas qu’il soit trop tard.
C’est parce que je suis convaincu que nous nous limitons nous-mêmes – et que nous passons trop d’énergie à nous convaincre que « c’est impossible chez nous » – que je consacre de l’énergie à formaliser et partager mes expériences pour donner des clés afin que tout redevienne possible. J’ai aussi pour cela publié deux livres dans lesquels je passe en revue les repères qui m’ont permis de dépasser mes blocages mentaux limiteur de performance, et qui, je l’espère vous aideront à dépasser les vôtres. Ces deux livres ont une page Facebook pour étendre les partages au delà de la simple lecture. N’hésitez pas à apporter les vôtres.
Cédric est l’auteur de deux livres :
Livre sur le management : Manager sans gaspillage, l’approche lean du management
http://www.facebook.com/pages/Manager-sans-gaspillage/136849066409889
Livre sur la supply chain : L’approche supply chain facile, apprendre à manager par les risques