Bonjour à tous ! J’espère que vous avez eu le temps de découvrir notre infographie consacrée à l’efficacité de vos réunions la semaine dernière. Aujourd’hui je vous présente un nouvel article : Le Lean vu par les « aveugles » par Gustave Paoli. Il vous propose de parcourir cette parabole indienne en imaginant le LEAN à la place de l’éléphant.
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Alors, le Bienheureux dit : « Ô moines, il y avait jadis un roi nommé Face de Miroir qui réunit une fois des aveugles de naissance »
Le roi leur dit : « Ô aveugles de naissance, connaissez-vous les éléphants ? »
Ils répondirent : « Ô grand roi, nous ne les connaissons pas, nous n’en avons aucune notion. »
Le roi leur dit encore : « Désirez-vous connaître leur forme ? »
« Nous désirons certes la connaître. »
Aussitôt, le roi ordonna à ses serviteurs d’amener un éléphant et aux aveugles de toucher eux-mêmes l’animal avec leur mains. Parmi ceux-ci, soit les défenses, soit la tête, soit le dos, soit le flanc, soit la cuisse, soit la patte antérieure, soit les traces de pas, soit la queue.
A tous, le roi dit : « Ceci est l’éléphant ».
Alors le roi Face de Miroir fit écarter l’éléphant et demanda aux aveugles : « De quelle nature est l’éléphant ? »
Les aveugles qui avaient pris la trompe dirent : »L’éléphant est semblable à un van. »
Ceux qui avaient pris une défense dirent : »L’éléphant est semblable à un pilon. »
Ceux qui avaient pris la tête dirent : « L’éléphant est semblable à un chaudron ».
Ceux qui avaient pris le dos dirent : « L’éléphant est semblable à un monticule ».
Ceux qui avaient pris le flanc dirent : »L’éléphant est semblable à un mur ».
Ceux qui avaient pris la cuisse dirent : « L’éléphant est semblable à un arbre ».
Ceux qui avaient pris la patte antérieure dirent : « L’éléphant est semblable à une colonne. ».
Ceux qui avaient pris les traces de pas dirent : « L’éléphant est semblable à un mortier. ».
Ceux qui avaient pris la queue dirent : « L’éléphant est semblable à une corde ».
Repris d’une idée utilisée par Durward K. Sobek et Art Smalley dans Understanding A3 Thinking: A Critical Component of Toyota’s PDCA Management System, cette petite histoire me semble illustrer parfaitement la difficulté de compréhension du LEAN par les occidentaux qui se sont intéressé à Toyota.
En effet, depuis que le mot LEAN a été inventé par un étudiant de l’équipe de Womack au MIT, l’approche a d’abord été vue comme un ensemble d’outils à utiliser, puis a progressivement évolué vers un ensemble de méthode, puis des principes, pour aboutir progressivement à un système complet de management de l’entreprise.
A chaque phase, les apprentis experts ont pu commettre de nombreuses erreurs liées à cette compréhension incomplète du LEAN:
– mise en œuvre des outils à marche forcée, à base de référentiels et d’audits administrés par une fonction centrale;
– choix d’outils susceptibles d’engendrer des gains rapides en faisant l’impasse sur des approches complémentaires et nécessaire sans gains immédiats associés;
– mise en œuvre à coup de chantiers spectaculaires menés par des équipes externes à l’entreprise, sans formation et sans mise en place des équipes de maintenance des acquis;
– utilisation des techniques de changement rapide d’outils pour gagner en quantité produite au lieu d’investir le gain en taille de lot plus faible;
– utilisation des approches d’équipes autonomes pour gagner sur le premier niveau de supervision (les fameux team leader dont le rôle chez Toyota est incontournable)…
– J’ai personnellement reçu le témoignage direct d’un vétéran de Peugeot Citroën qui se souvenait que son patron, de retour du Japon, avait expliqué qu’il s’agissait de mettre des étiquettes (kanban) partout dans l’usine pour que cela améliore les résultats…
Mais alors, avons-nous des chances de pouvoir mettre en œuvre avec succès une approche LEAN?
La réponse est clairement oui, comme le démontrent les entreprises qui ont su le faire avec une vision adaptée (souvent liée à des dirigeants acceptant d’être personnellement guidés dans leur apprentissage personnel)
Pour atteindre ces mise en œuvre durable et profitable du LEAN, Il faut reconnaitre que le secret se situe dans le meilleur développement et la meilleure utilisation des ressources intellectuelles mises à disposition par chaque employé pour – jour après jour – se questionner sur ce que demande le client, se comparer au standard défini pour répondre à ses attentes, analyser les déviations, en rechercher les causes profondes, se mettre d’accord sur une solution, en valider scientifiquement (mais au plus bas niveau possible) l’efficacité et en généraliser l’application.
Mais alors me direz-vous: « Pourquoi cette leçon si simple serait-elle si difficile à mettre en œuvre? ».
Cela sera peut-être le sujet d’un prochain post.
Bonne lecture et merci pour vos réactions,
Gustave Paoli