:: – Article proposé par Sylvain ROUSSEL – ::
:: – Responsable lean manufacturing chez Facom – ::
:: Auteur de l’article « Boucle de rétroaction et dérive qualité » – ::
Philippe Etchebest, qui tente de venir en aide à des restaurateurs en difficulté.
Cette émission a été l’occasion pour moi de repérer certaines similitudes avec le Lean.
Dans cette émission le chef Etchebest se donne une semaine pour créer une rupture dans la façon de faire. On retrouve le principe des chantiers Kaizen blitz ou Hoshin. D’ailleurs le déroulement de l’émission suit les grandes étapes du chantier :
• Observations sur le terrain
• Analyse de la situation et propositions d’amélioration
• Mise en place des bonnes pratiques
• Essai de la nouvelle organisation
Observations sur le terrain :
Dans la première partie de l’émission le chef se met d’abord à la place du client. Ceci lui permet rapidement de mesurer lui-même la satisfaction client (voir à ce sujet l’article de Florent https://www.excellence-operationnelle.tv/ce-que-walt-disney-et-einstein-ont-a-nous-apprendre-sur-la-voix-du-client.php)
Il analyse ensuite le temps d’un service le fonctionnement global du processus de l’accueil client jusqu’au paiement de la note. Le chef est présent sur le gemba et identifie les dysfonctionnements majeurs du processus.
Analyse et propositions d’amélioration :
Une fois les dysfonctionnements repérés le chef propose des solutions. Les améliorations sont liées à la situation mais on retrouve souvent les mêmes outils.
La gestion d’un restaurant commence par une hygiène irréprochable. Le 5S est donc le premier élément fondamental à vérifier ou remettre en place.
Second élément clé : la gestion de la qualité.
Bien souvent la qualité des repas servis n’est pas conforme aux standards du métier.
Si le cuisinier manque de compétences, le chef essaie de le former rapidement sur une ou deux recettes.
Autre point fondamental : les ingrédients. Cela s’accompagne d’une revue des fournisseurs et d’une recherche de solutions locales. L’idée est d’avoir un lead time court avec les fournisseurs afin de servir des produits frais.
Enfin le processus est souvent compliqué. L’amélioration passe par une simplification du processus. L’exemple le plus simple consiste à rationaliser la carte des menus. Avoir moins d’ingrédients et moins de recettes à gérer réduit la complexité sans pour autant nuire à la satisfaction client.
Mise en place des bonnes pratiques et essais de la nouvelle organisation:
Vient ensuite le temps de la réimplantation. Cette étape permet de réorganiser l’esthétique de l’établissement, les flux du restaurant, de la cuisine. Il peut aussi y avoir une répartition des taches – par exemple le plongeur qui peut aider à la préparation de certains ingrédients ou le patron qui peut prendre des commandes – L’organisation s’adapte en fonction de la demande client.
On retrouve tout l’esprit Kaizen dans cette étape avec comme objectif une amélioration immédiate de la situation même si celle-ci n’est pas parfaite.
Une fois les modifications effectuées l’organisation est testée par une cérémonie de réouverture du restaurant. C’est l’occasion de voir si les améliorations ont porté leurs fruits. Ceci permet aussi de convaincre l’équipe de l’établissement que le changement est possible et que la voie à suivre est la bonne.
Différences notables par rapport à une approche de type lean:
Le but de cette émission est de faire du spectacle. Il faut donc émouvoir, faire rire…et le style de management du chef doit donc être spectaculaire. Le chef utilise un management directif et n’hésite pas à se moquer, ce qui est bien différent d’une attitude kaizen où l’on recherche à créer un esprit d’équipe en utilisant plutôt un management semi participatif.
L’autre différence majeure concerne l’accompagnement, le suivi. Une fois la semaine écoulée le restaurateur se retrouve seul, ce qui fragilise les chances de réussite du chantier à moyen terme…
A quand une émission de divertissement où l’on ferait du Lean dans une entreprise ?
Bonjour Sylvain, oui en effet tout à fait d’accord ! j’avais également remarqué comme c’est frappant 😉
Mais j’avoue que la version américaine (ou anglaise) avec le Chef Gordon Ramsay est encore plus frappante…à se demander même si initialement ce n’est pas une émission LEAN appliquée au métier de la cuisine…
Au point, où je me suis souvent surpris à retrouver de (facon light biensûr) les 5 Phases du DMAIC qui structurent l’émission. Incroyable !
Mais alors, le Chef Gordon n’aurait il pas été formé à cette démarche d’excellence opérationnelle ?
Je vous conseille vivement de regarder cette version anglophone.
Néanmoins, j’aime tout autant la version française avec un Etchebest tellement charismatique…
Cordialement,
Philippe
PS : Florent, dans Excellence-Opérationnelle.TV il y a « Excellence Opérationnelle » et « TV », alors à quand une émission à proposer aux média TV ? 😉
Très belle analogie.
En septembre dernier, Florent avait réalisé une brillante interview de la responsable de l’Hôtel-restaurant « les orangeries » à Lussac-les Châteaux. C’est la vision, l’implication du personnel et la voix du client qui m’avaient marqué dans cette interview (12 septembre), en plus du kanban pour gérer la cave!!!
Cordialement.
Stéphane
Bonjour, super article mais c’est quoi le Lean ?
Le métier de la restauration (dans une pratique classique) est la meilleurs des applications du lean. Responsabilisation, savoir faire, discipline, passion, transversalité, rangement.
Je regardais une émission avec Ducasse (le cuisinier) qui parlait d’amélioration continue avec une vision que beaucoup mériteraient d’essayer comprendre. Faire grandir ses équipes et les amener à faire le meilleurs en les formant.
Merci pour vos témoignages.
@Olivier : difficile de définir ce qu’est le lean de façon succinte mais tu pourras trouver des éléments en lisant cet article :
http://www.lysippe.com/spip.php?article100
Cordialement,
Sylvain
Bonjour à tous,
Je connais cette émission, et je me suis d’ailleurs dis plusieurs fois qu’il faudrait que je me lance dans la production de « panique en usine », il y a sur ce terrain de jeu matière à quelques séances croustillantes.
Je suis consultant, dans l’industrie agroalimentaire principalement, et il y a des moments où je me prends à rêver de pouvoir parler à mes clients comme Gordon Ramsay (mais je n’ai pas l’aura professionnelle de ce charismatique chef).
Pour poursuivre l’analogie évoquée par Sylvain, je dirais qu’on trouve dans cette émission les mêmes dangers que ceux qu’on peut trouver dans un chantier pilote d’une démarche (quel que soit son nom plus ou moins japonais d’ailleurs).
On y trouve ainsi une débauche de moyens (le super chef hyper compétent et d’une énergie à faire pâlir une pile atomique, l’équipe-qui-redécore-le-resto-tout-pourri en une nuit), une obligation de résultat (je n’ai pas souvenir d’une émission qui se termine par un gros flop) le tout dans un temps limité, et sous les yeux de tout le monde (en l’occurrence tous ceux qui regardent l’émission, ainsi que ceux qui la financent…).
Du coup le risque est grand de se retrouver au bout du temps du chantier Gordon avec une belle réussite, qui malheureusement ne tiendra pas dans le temps.
Il faut donc se méfier lorsque l’on engage un chantier pilote sur une démarche (quelle qu’elle soit), et ne pas transformer ce pilote en concours, dans lequel les équipes vont dépenser une énergie considérable pour arriver au résultat, avec félicitations à la clé par la direction. Car les chantiers suivants (maintenant il n’y a qu’à déployer) ne bénéficieront pas des projecteurs du prime time, et c’est bien la capacité des équipes à faire évoluer leurs modes de fonctionnement dans la durée qu’il convient d’encourager et de valoriser.
Et merci à Sylvain pour le lien vers un site très intéressant.
Johann
Consultant