J’adore aller au marché ! Et vous savez pourquoi ? Car on y retrouve un certain bon sens !
Je dis bien un « certain bon sens » car je prends toujours beaucoup de pincettes à utiliser le terme « bon sens »… Je ne sais pas pour vous, mais de ma propre expérience, beaucoup d’actions réalisées par des managers au nom du bon sens m’apparaissent totalement contre performantes ! Par exemple, embaucher une nouvelle personne quand la charge de travail augmente relève-t-il du bon sens ? Recruter un statisticien pour améliorer les prévisions de vente relève-t-il du bon sens ? Augmenter la taille des lots pour réduire les coûts en réalisant des économies d’échelle relève-t-il du bon sens ?
Bref, je pense que vous voyez où je veux en venir… ;-P Mais, ne nous égarons pas et revenons-en à mon marché ! En plus d’y retrouver un certain bon sens, le marché me permet d’acheter des produits frais à un prix très raisonnable.
Les prix irrésistibles de mon primeur adoré…
Le plus intéressant reste le primeur ! Quand j’ai le malheur d’acheter deux kilos de pommes, il trouve toujours le moyen de me refiler un autre récipient de fruit ou légume auquel je ne me serais jamais intéressé tout seul…
Dimanche dernier, j’achète deux kilos de poires (oui, c’est souvent par deux kilos), puis je passe au légume pour lui demander une salade. Le temps de m’emballer tout ça, il me dit de regarder ses beaux choux-fleurs à 2€. Me voyant hésiter il me dit que je peux en prendre pour 1€. Dans la foulée il me propose également 50% sur les poireaux… Bref avec 10€ j’avais l’impression de pouvoir le dévaliser ! 😉
Ce que mon primeur perd à ne pas maîtriser le contrôle de gestion…
En repartant les bras bien chargés, je me suis dit que les contrôleurs de gestion auraient intérêt à aller au marché plus souvent !
Il faut savoir que ce primeur est en concurrence sur ce marché avec au moins une dizaine d’autres. Ils sont 6 ou 7 à servir en permanence les gens qui passent. Vous imaginez le chiffre d’affaires à générer pour couvrir ces frais ? Imaginez maintenant quels seraient ses réflexes s’il avait établi le coût de revient de ses produits. Imaginez notre primeur avec dans sa tête l’affectation des charges de personnel sur chacun des produits qu’il a à vendre…
Si mon primeur connaissait ses prix de revient…
S’il avait ce prix de revient en tête, jamais il n’accorderait de remise de 50% ! Car avec l’intégration du prix de revient, il aurait le sentiment de vendre à perte…
S’il avait ce prix de revient en tête, il baisserait certainement ses effectifs pour améliorer sa rentabilité…
S’il avait ce prix de revient en tête, il se limiterait à vendre les produits qui lui offrent la meilleure rentabilité par rapport à l’effort fourni…
Bref, s’il avait les prix de revient en tête, il finirait tout seul à vendre des mangues à deux passants en priant qu’il en vende assez pour avoir l’argent nécessaire pour payer son emplacement la semaine suivante !
Les 2 leviers d’action de mon primeur…
En n’ayant aucune conscience du prix de revient, mon maraicher se focalise sur son chiffre d’affaires. Et pour faire augmenter son chiffre d’affaires, il a deux leviers :
Le premier consiste à augmenter son nombre de clients. Pour cela il crie fort, et affiche des prix imbattables.
Le deuxième consiste à augmenter le panier moyen par client. Pour cela il propose des remises supplémentaires qu’il est très difficile de refuser.
Et comme mon maraicher est le meilleur de la place du marché, il a même un truc pour ne pas repartir avec des produits périmés : il les vend 4 à 5 fois moins cher… C’est comme ça que je suis reparti avec 4 mangues pour 1€ avec pour seule contrainte de les manger le midi même…
Pour qui je prie le dimanche ?
Voilà pourquoi chaque dimanche qui passe, je prie le seigneur pour que mon maraicher ne se laisse jamais former au contrôle de gestion… Parole d’ex-contrôleur de gestion ! 😉
Et vous, vous arrive-t-il que des commerçants vous donnent des leçons de gestion ?
N’oublies pas ce que disait Descartes: « Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ; car chacun pense en être si bien pourvu, que ceux même qui sont les plus difficiles à contenter en toute autre chose n’ont point coutume d’en désirer plus qu’ils en ont. »
Bonjour Michel,
Merci pour cette citation que je partage… C’est la raison pour laquelle je mentionne un « certain bon sens ».
Je ne savais pas que Descartes s’était prononcé sur le bon sens… J’adhère à ce propos, mais je m’en garde bien de devenir cartésien pour autant… 😉 (Cf : http://leansixsigma.free.fr/?p=611 )
A bientôt.
Parlant de bon sens, je vous conseille vivement un roman industriel de Eliyahu M. Goldratt : LE BUT (The GOAL)dans lequel il relate l’histoire d’un directeur d’usine qui en se levant un bon matin découvre que son unité est menacée de fermeture et qui, grâce au bon sens, arrive à la sauver. Bonne lecture.